mercredi 16 juillet 2008

Du 6 au 10 juillet - Minorque pour finir en beauté

Cadix-Minorque d’une traite : 600 milles, 6 jours ! Nous passons devant toutes les îles Baléares sans même un petit crochet pour s’assurer qu’il y a toujours autant de millionnaires à Majorque, de filles pas du tout sexy à Ibiza (ça va, je rigole !) et de scooters à Formentera. On trace, on trace jusqu’à Minorque. Au petit matin, dans le port de Mahon, Papa-Papy-René est là. Il a répondu à la petite annonce concernant une recherche d’équipier pour rallier Minorque à Toulon. En fait, toute la famille s’est cotisée pour lui offrir le billet d’avion comme cadeau pour ses 70 ans. Et ça tombe bien : nous souhaitions un jeune équipier, mobile, motivé, facile à vivre.

Au petit matin, donc, le matelot est à poste, avec son petit baluchon et son traité sur l’art byzantin. Il a dormi par terre sur le quai, entortillé dans la toile de jute d’un optimist. Les retrouvailles sont extrêmement joyeuses (on ne s’est pas vu depuis janvier en Martinique), mais un rien épuisantes : en un clin d’œil, papy est bombardé de trucs vus et entendus aux quatre coins de l’Atlantique depuis 6 mois ! Des Cubains, on passe aux tortues Luth puis aux bermudas des Bermudiens, sans oublier les langoustes du Venez, les filles de Cadix, les hortensias des Açores, les cascades de la Rép Dom et bien sûr les plages des Bahamas, et, et, et…. C’est une sorte de test. Les enfants envoient la sauce. Après, on voit si l’équipier est toujours là ou s’il est reparti à Toulon à la nage. Mais non : il est bien là, sorti vainqueur de la tempête. Et, même s’il a tendance à faire pousser des hortensias aux Bahamas et des langoustes à Gibraltar, on considère que c’est tout bon. Admis à l’embarquement.

Trois jours durant, nous nous baladons autour de Minorque. La ville de Mahon est mignonne, bâtie toute en hauteur, en bonne forteresse méditerranéenne. Longtemps aux mains des Anglais, elle reste largement fréquentée par une clientèle britanniques bicolore (pile : blanc ; face : rouge). Peu de choses à voir sinon une vue superbe sur cette calanque de 6 km de profondeur, et un musée qui nous replonge au cœur d’une histoire millénaire avec ses portulans, ses amphores, ses poteries… Ca fait bien longtemps qu’on avait pas vu un si beau sanctuaire, privilège de l’Europe et de la Méditerranée.

Le reste du temps se passe au mouillage. A l’Ile Colom, d’abord, très joli endroit, très sauvage et peu fréquenté. Sur la petite plage au sable chaud, nous faisons connaissance avec un équipage de… Toulousains sympathiques que nous invitons à l’apéro. Il y a même un jeune garçon de l’âge de Pablo qui accroche tout de suite avec les enfants. Ce sera le dernier copain rencontré durant ce voyage, et la dernière soirée à jouer comme des fous sur le bateau.

Le lendemain, nous débarquons dans le petit village d’Es Grao. Il y a des barques de pêcheurs qui se dandinent au rythme du clapotis, des maisons peintes à la chaux, du bougainvillier qui dégringole le long des murs… Tout le charme de la Méditerranée est là, sans fard et sans tapage. Dans l’après-midi, cap un peu plus au nord, à Cala de Addaya. Encore un petit coin de paradis : une calanque profonde, d’un calme inouï. On se croirait sur un lac !

Nous quittons Minorque un peu trop vite à notre goût. Nous sommes séduits par cette île sauvage et si tranquille, très éloignée de l’arrogance de ses sœurs des Baléares. Oui, c’est sûr, nous reviendrons avec beaucoup de plaisir courir le long des murets de pierres sèches sur cette côte pleine de secrets bien gardés. Mais maintenant, il faut partir. Nous sommes attendus à Toulon ce week-end pour boucler la boucle. Pour mettre définitivement pied à terre. Cap au nord pour cette toute dernière navigation d’à peine 48 heures. Dernier repas, dernier quart, dernier thon, dernier point, dernière baignade…

Les retrouvailles avec Papy

A Mahon

Le petit port de lôçile Colom

Toute une ambiance

... et quel régal ces tapas !

Famille de retour de voyage

Dernière escale

Mes 70 ans à Minorque

Bon anniversaire...

Papy chéri

Dernier resto

Dernière toilette sauvage

Gautier, dernier copain rencontré

Dernier apéro improvisé

Dernier plongeon

Dernier thon

Derniers pancakes

Dernière image

mardi 8 juillet 2008

30 juin-6 juillet Gibraltar 2 : cette fois, c’est la bonne !

Ça a été dur, mais ça y est, c’est fait, c’est passé. 14 virements de bord. Nuit pénible surtout au niveau de Tarifa, avec un bon force 6 passé sous 1 ris (seulement) et trinquette. Même quand le synoptique est faible, tout s’accélère dans le détroit !
Au petit matin, nous sommes sous le Rocher. Les cargos et les pétroliers sont au rendez-vous par dizaines. Heureusement, la mer s’est calmée. Mais, le brouillard, lui, se lève. Epais comme jamais. Par moment, on ne voit même plus l’avant du bateau. Dans la purée de pois, on entend les cornes de brume des mastodontes qui nous encerclent. Des géants d’acier de 300, 400 000 tonnes. Gloups ! Sur notre écran radar (l’une des rares fois où nous nous en servons), il y a des taches brunes tout autour de notre petite coque. La vigilance est de tous les instants. Décidément, rien n’est jamais simple à Gibraltar !
Nous hésitons un moment à nous arrêter : nous attendions depuis si longtemps cette escale, la seule que nous aurions vécue deux fois dans le voyage ! Mais le temps nous manque : il nous faut tracer droit en direction des Baléares où Papy nous attend dès vendredi. C’est promis, les enfants, nous reviendrons un jour prendre une douche chaude à Marina Bay !
A défaut, nous nous offrons un bon plongeon au large après avoir vu des dizaines de dauphins. L’eau est carrément tiède.
Mais c’est bien sûr !!!!
Nous sommes en MEDITERRANEE !!!

Gibraltar, notre bête noire

Des cargos gros

De très gros pétroliers

... énormes

... qui apparaissent

... et disparaissent tels des fantômes

L'écran radar complètement saturé. On est cerné !

Passé le Rocher, tout se calme.

Qu'elle est bonne la Méditerranée !
En plus, il y a des dauphins par dizaines

... encore et encore !

Parcours Açores-Minorque

26-30 juin Merci la tempête et vive Cadix !

A toute chose...
Magie d’un voyage comme le nôtre. Il y a des noms que l’on croyait à jamais couchés sur une carte : Bermudes, Cuba, Almeria, Cadix… Et tout à coup, parce que les rencontres, parce que la météo, parce que, parce que…, on y est. Nous voici donc dans cette ville mythique d’Andalousie. On a un peu peur : que va-t-on trouver dans ce grand port d’Espagne derrière la murailles de conteneurs, inlassablement chargés et déchargés des cargos comme des briques d’un Légo géant ?
La marina Puerto America est excentrée. Nous longeons le bord de mer pendant une bonne demi-heure avant de nous enfoncer dans les entrailles de la vieille-ville. Et là, c’est la surprise du chef. En un clin d’œil, Cadiz nous aspire dans son tourbillon, nous adopte, nous enchante. Toute une culture, toute l’âme andalouse nous monte au cœur comme si plus rien n’existait à part elle. Il y a des volets à clair-voie, des fleurs partout aux balcons, des patios, des ruelles pavées où les mémés prennent le frais, dépliant l’éventail d’un coup sec.
Au détour de la cathédrale, des dizaines de jeunes filles font taper leurs talons et froufrouter leur robe rouge, jaune, verte… C’est jour de remise des diplômes. Elles sont belles comme des soleils. Les longues chevelures brunes ondulent dans le dos. Les garçons, cheveux noirs gominés, se tiennent droit tant qu’ils peuvent pour grappiller les centimètres manquants.
On n’entend pas le flamenco, mais il pulse partout, dans la façon qu’on les gens de marcher, de parler fort, de regarder sans détour. Dans sa robe rouge à points blancs, Tiphaine jubile. Une jeune fille s’arrête près d’elle et, tac, tac, tactactac, c’est parti pour une petite leçon autour du pas de base.
Fred remercie la tempête, la météo et tous ses Saints (ou plutôt ses démons).
Oh que oui, mon chéri, on a bien fait de s’arrêter à Cadix !

Foot et tapas
Pendant trois jours, nous arpentons inlassablement les pavés de cette très belle ville, débarrassée (et ça, c’est vraiment génial) de la plupart de ses voitures. Mais inutile de s’exciter trop vite. Il fait une chaleur affreuse, très sèche, bien supérieure à tout ce que nous avons connu aux Antilles. Alors, on adopte le rythme andalous, sortant de plus en plus tard, nous couchant de plus en plus tard, nous levant de plus en plus tard.
Nos promenades nocturnes sont placées sous le signe du foot (on est en plein Euro2008 et l’Espagne est en finale !!!), et des tapas. Calamares a la plancha, pulpo, boquerones, tortillas de camarones, jamón, papas alinas… Les enfants raffolent de cette ronde de petits plats plein d’ail et d’huile d’olive que l’on mange des yeux, et dans lesquels on plonge à pleines mains. Et quand, en plus, tout cela se passe en terrasse et qu’il y a un écran télé permettant de crier Viva España à plein poumons, il n’y a franchement plus de raisons de se presser pour aller se coucher. Surtout ne pas rater le bar Pajaro pinto, plaza Tio de la Tiza. Tout y est succulent et l’ambiance inégalable.
Après avoir arpenté le marché aux poissons hallucinant, et avoir fait le plein de pêches, de prunes, de cerises à des prix imbattables, il nous faut nous résoudre à quitter la belle Cadiz. Au loin, les familles rentrent de la plage, sans se presser. Jamais. Finalement, tout le charme de cette ville a été de garder en son centre, ses « vrais gens » avec leur éventail, leur relax, leurs savates.
Merci mille fois à toi, Yvette, pour nous avoir offert cette délicieuse escale. Mais, il y a une fin à tout. Et cette fois, nous ne pouvons plus reculer. Il nous faut passer Gibraltar. Brrrrr…

España...

... nous voilà !

Cadix et ses ruelles fleuries,

ses patios...

...ses bodegas

... ses écoles de flamenco

...ses supporters

...ses passionarias du loto

... ses palais

...son bord de mer

... son ciel éblouissant

... son rythme tranquille

...son bouquet d'éventails

... et ses groupies !

Adieu la Belle

24-26 juin : Gibraltar, notre bête noire


Départ trop tard

Nous partons de Lagos un jour trop tard. Le vent est déjà fort dans le détroit de Gibraltar, et en plus, et surtout, nous l’aurons dans le nez lorsque nous approcherons ce lieu maudit. En septembre dernier, alors que nous passions le détroit dans l’autre sens, une tornade nous est tombée dessus, nous laissant en cadeau le pire scénario épouvante de cette année de voyage.
La première nuit est une mise en bouche : alors que nous longeons la côte portugaise, nous nous prenons dans les mailles d’un chalut. L’hélice, heureusement n’est pas touchée, mais le filet est pris dans la quille. Nous manœuvrons tant bien que mal pour nous en sortir, aidés du patron-pêcheur qui nous dicte la marche à suivre par VHF, mais… en portugais. On comprend 1 mot sur 3, assez pour piger qu’il faut couper. Alors on sort le gros couteau et on cisaille. Gentiment, les pêcheurs passeront ensuite un long moment à nous guider pour nous sortir définitivement de cette nasse. Ça fait bizarre : cette nuit-là, on s’est vraiment senti comme un poisson pris au piège.

Mer forte à très forte
Les choses délicates commencent le lendemain après-midi. Le vent se lève, dans le nez, comme prévu. Fort, de plus en plus. Nous passons le golfe de Cadix, et visons Trafalgar.
La mer se creuse. Il faut tirer des bords serrés. Très. Le bateau est à la gîte. Les vagues sont de plus en plus hautes. De l’intérieur du carré, je vois Fred, à la barre, monter et descendre comme un yoyo, disparaître, réapparaître, disparaître, complètement aspergé. A l’intérieur, je suis assignée aux serpillières et tente tant bien que mal de faire cuire quelques pâtes ( fini le temps où les enfants ne mangeaient rien lors des navigations dures ! ). Pour la première fois, nous sortons les cales pour maintenir la cocotte sur le réchaud, et nous nous équipons d’un double harnais même à l’intérieur du cockpit. Il est évident que nous ne pourrons pas rallier Gibraltar où le temps doit être encore pire qu’ici (plus le détroit devient étroit, plus le vent forcit). Décision a été prise de s’arrêter dans le petit port de Barbate, à quelques milles de Trafalgar.
C’est dur et long. C’est même interminable. A 21 heures, nous ne sommes plus qu’à 2 heures de Barbate (sic). Mais la mer est maintenant très forte, le vent souffle à 40 nœuds (un bon force 8) et tout indique que nous ne pourrons pas négocier une entrée de nuit, et par ce temps, dans ce petit port.
Finalement, le capitaine, qui rumine sa décision depuis plusieurs heures en secret, le bougre, lâche le morceau :
« On abandonne. On repart. »
« -Où ? A Lagos ? Aux Açores ? Aux Antilles ? »
« A Cadix. »
Demi tour. Le bateau se stabilise comme par miracle, poussé à toute barzingue, vent dans le dos. Il n’y a bientôt plus un souffle d’air. Il faut même démarrer le moteur ! Je quitte mon quart à 4 heures. A 9 heures, je m’éveille. Il y a un silence étrange, un calme divin. Je pointe un nez dehors. Il y a des bateaux à droite, à gauche, devant. Le ciel est d’un bleu immaculé. Le bateau est à quai.
Nous sommes à Cadix. Et c’est forcément bien.

23-24 juin Lagos (Portugal) : l’escale de trop

Deux jours d’escale à Lagos. C’est bien assez pour se rendre compte que rien ne pousse mieux que les grues sur tout le littoral. Même au Portugal. Le petit port que Fred gardait en mémoire depuis son tour d’Espagne, il y a 20 ans (et même encore plus que ça …) a définitivement disparu de la carte. Les douaniers ne viennent plus en barque accueillir les nouveaux arrivants. Désormais, le plaisancier se démerde seul et ça fait du grabuge quand il faut se frayer une place au quai (forcément étroite) par vent fort (un chandelier esquinté). Le même plaisancier arpente des pontons de bois nettoyés au karcher (Capverdiens, si vous saviez…). Il pousse des portes qui s’ouvrent et se ferment avec des cartes à puce. Il se douche dans des sanitaires dignes d’un hôtel 3 étoiles, puis s’en va longer la promenade de la marina sous les lumières de Pizza Hut, et d’autres agents de la mafia mondiale, assez peu branchés sardinades.
Nous voilà donc revenus sur notre continent. Ça sent très fort l’argent. Il va nous falloir du temps pour se réadapter à tant de confort, de luxe, de facilité, de choix, d’excentricité. Heureusement, nous avons oublié… notre carte bleue aux Açores (eh oui, c’est l’un de nos gags préférés dès que l’ambiance retombe un peu !). Super Marraine Yvette intervient à grand renfort de Western Union, et nous revoilà repartis dare dare pour Gibraltar. A moins qu’il ne soit déjà trop tard. Priez pour nous sainte Paula…